Inter-Environnement Bruxelles
Marche pour le Marais Wiels © IEB - 2022

L’Union Européenne dans sa forteresse bruxelloise

Organisée dans le cadre de la Semaine de la sécurité de la Ligue des droits de l’homme, une balade avait pour objet de montrer en quoi l’arrivée des institutions européennes au quartier Léopold avait modifié profondément un lieu de vie dont les habitants s’étaient sentis progressivement dépossédés.

C’est sous un soleil riant qu’une petite trentaine de participants ont arpenté ce samedi les rues du quartier européen en vue de humer son air hautement sécurisé. Organisée dans le cadre de la Semaine de la sécurité de la Ligue des droits de l’homme, cette balade avait pour objet de montrer en quoi l’arrivée des institutions européennes au quartier Léopold avait modifié profondément un lieu de vie dont les habitants s’étaient sentis progressivement dépossédés. Outre les pressions urbanistiques et immobilières, leur quartier s’est retrouvé réorganisé sous le prisme de la sécurité tant dans la façon de penser l’aménagement que dans le rythme du quartier ponctué par les grands sommets de l’Union.

Pour Marco Schmitt, architecte et membre de l’Association Quartier Léopold, la sécurité enferme et exclut. Là où le projet urbain, qui est aussi un projet politique, devrait nous parler d’une société ouverte, accueillante, et inclusive, nous ne voyons que méfiance, retranchement, contrôle et donc agressivité. Un espace gris et morne, des façades constellées de caméra, des entrées invisibles, des rez-de-chaussée aveugles et des rues intérieures déconnectées frileusement repliées sur elles même qui n’expriment que mise à distance de tous ceux qui ne sont pas autorisés à franchir les portiques qui chantent.

L’architecte et urbaniste Benoît Moritz décrypte l’architecture sécuritaire du Berlaymont, particulièrement depuis sa rénovation dans les années 1990. Forteresse entourée de murailles et de douves, il n’est accessible que de manière biaisée par des parcours toujours en rampe. Condamnant les usagers à un flux sans répit, planté dans un espace public agressif, il est bien représentatif de cette architecture défensive qui traverse tout le quartier, qui perçoit le monde extérieur comme une éternelle menace et qui en conséquence le rend effectivement menaçant.

Etienne Christiaens, urbaniste et ancien membre du Groupe d’animation du quartier européen évoque le deux poids deux mesures, l’insignifiance de l’habitant face à la grandiloquence de l’institution. Chaque parcelle d’espace vert ou de jeux, chaque maintien de l’un ou l’autre banc où se poser, devient un combat de titan souvent voué à l’échec.

Si le besoin d’assurer un contrôle centralisé d’ensembles de plus en plus vastes permet peut-être et au moins d’améliorer la sécurité à l’intérieur des institutions européennes, la réduction de l’espace public à des fonctions de flux participe à la dégradation du sentiment de sécurité des usagers et, par conséquent, à l’augmentation des coûts collectifs de sa gestion (besoin de plus de policiers financés par une zone de police pourtant exsangue). Solution proposée à ce cercle vicieux : la privatisation du maintien de l’ordre.

Pour ceux et celles qui auraient voulu se joindre à nous, tout n’est pas perdu. Vous pouvez visionner ce petit film réalisé par PTTL dans le cadre du PleinOPENair du cinéma Nova 2010 : http://vimeo.com/21396457. Un parcours de 10 minutes dans l’absurdité du monde sécuritaire de l’Europe.

Le film de I love Eu de PTTL.