Sur la route
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11 juillet 2018
Jack Kerouac, 1951.
[…] Et nous sommes entrés dans Mexico. Un bref col de montagne nous mène à un sommet d’où nous voyons toute la ville dans son cratère, en contrebas, avec ses fumerolles urbaines, et ses lumières qui brillent déjà. On fond sur elle, on tond sur Insurgentes Boulevard, plein pot, jusqu’au Paseo de la Réforme, cœur battant de la cité. Des gamins jouent au foot sur d’immenses terrains tristes, en faisant voler la poussière. Des chauffeurs de taxi nous rattrapent, pour savoir si nous voulons des filles. Non, des filles, pas tout de suite. De longs bidonvilles en torchis s’étendent sur la plaine ; on voit des silhouettes solitaires dans les ruelles en crépuscule. La nuit viendra bientôt. Et puis c’est la clameur de la cité, nous voilà devant des cafés bondés, des cinémas ; des mécaniciens passent, pieds nus, le pas traînant, avec leur clef anglaise et leur chiffon. Des chauffards indiens aux pieds nus nous coupent la route, nous encerclent en klaxonnant, dans un trafic dément. Un boucan incroyable. Il n’y a pas de silencieux sur les voitures mexicaines ; on écrase le klaxon allègrement, en permanence.[...]
Sur la route fut l’un des romans fondateurs de ce que Kerouac nomma lui-même la Beat Generation écrit d’un seul jet, en trois semaines (du 2 au 22 avril 1951), sur un rouleau de papier de 36,50 mètres) de long et prenant pour décor la société et le continent américains.