Comme toutes les forêts de plaine d’Europe occidentale, la forêt de Soignes est rudoyée par le contexte global des dérèglements climatiques. Or, ses caractéristiques intrinsèques et sa localisation invitent à la sortir d’une gestion classique dont une sylviculture à vocation économique.
De nombreux facteurs mettent les forêts sous pression à l’échelle planétaire : changement climatique, déboisement ou surexploitation, fragmentation, crise de la biodiversité, pressions humaines directes et indirectes, pollution atmosphérique… Or, toutes les espèces vivantes, humaines et non humaines, ont un besoin vital de forêts pour assurer leur pérennité. Malgré toutes ces pressions, leur résilience ne cesse d’étonner ; et la complexité de leurs dynamiques spontanées ou l’étendue des services écosystémiques [1] qu’elles offrent continuent d’être progressivement dévoilés par la recherche scientifique. La forêt a d’ailleurs entamé un retour dans certaines régions d’Europe suite à la déprise agricole.
Depuis une vingtaine d’années, les politiques de gestion forestière en Europe occidentale déclarent s’appuyer sur trois piliers : la préservation de la biodiversité, l’accueil du public et la fonction économique, cette dernière restant de loin prépondérante dans la pratique. Néanmoins, la gestion des forêts fait face au défi d’intégrer aujourd’hui toutes les évolutions complexes du contexte global, ce qui s’avère de plus en plus difficile vu les fréquences et amplitudes variables et non prévisibles des perturbations à venir. Les événements météorologiques extrêmes, tels les sécheresses longues, les pics caniculaires répétés, les épisodes de pluie intense, les vents de tempête, et le développement de pathologies forestières et des chablis [2] subséquents, se multiplieront à l’avenir. Dans ce contexte, le concept même de « gestion » de la forêt est progressivement questionné, son efficacité de plus en plus incertaine face à des changements chaotiques tandis que, par contraste, de nombreuses études mettent en lumière la grande résilience des processus écosystémiques de forêts en libre évolution.
La Région de Bruxelles-Capitale a le rare privilège d’être bordée par une des plus grandes forêts périurbaines d’Europe : la forêt de Soignes. Outre sa très grande superficie (4 400 hectares), cette forêt ancienne, ayant survécu aux velléités de déboisement intégral pendant des siècles, est également exceptionnelle par son caractère paysager, sa hêtraie cathédrale patrimoniale et sa riche biodiversité. Mais c’est davantage par sa proximité immédiate avec une population de 1.2 million d’habitants qu’elle se distingue. Ses fonctions récréatives, de ressourcement physique et mental, d’inspiration, de refuge tempéré où respirer lors des canicules, son rôle éducatif et de sensibilisation à la nature et à la biosphère y prennent une importance inégalée en Belgique. La forêt de Soignes est par conséquent un véritable laboratoire socioécologique où s’entremêlent trois composantes particulières : une société urbaine en demande croissante de lien avec la nature, un enjeu de préservation et de naturalité [3], et enfin la proximité d’une « autre nature », une « nouvelle nature », la biodiversité urbaine fortement marquée par l’influence de l’homme mais tout aussi spontanée. Bien que la forêt de Soignes, comme toutes les forêts de plaine d’Europe occidentale, n’échappe pas au contexte global des dérèglements climatiques, ses caractéristiques intrinsèques et sa localisation invitent à sortir d’une gestion classique. Notamment, la poursuite d’une sylviculture à vocation économique devrait être mise en balance avec ses enjeux spécifiques.
Le concept même de « gestion » de la forêt est progressivement questionné, son efficacité de plus en plus incertaine face à des changements chaotiques.
Le caractère exceptionnel de cette forêt périurbaine est-il compatible avec un objectif productiviste ? Environ 7 000 mètres cubes de bois sont produits annuellement pour la partie bruxelloise de la forêt de Soignes (1 660 hectares) pour un revenu de 400 000 euros par an. La somme est reversée à la politique environnementale globale de la Région de Bruxelles-Capitale, ce qui représente un montant dérisoire face aux budgets engagés. À la différence d’une partie des forêts wallonnes qui reste appelée à produire cette matière noble qu’est le bois, la forêt de Soignes devrait sans doute en être exemptée. En majeure partie du moins, car une initiative bruxelloise, encore modeste, mais intéressante, propose en effet un nouveau type d’économie de filière du bois basée sur la durabilité écologique, la circularité et l’ancrage local. Un modèle qui se démarque du système productiviste et non durable actuel qui aboutit à l’exportation des hêtres bruxellois vers la Chine, et retour vers l’Europe après transformation. La Wallonie devrait également faire évoluer son modèle économique et ses pratiques sylvicoles en produisant du bois uniquement de façon durable, moins interventionniste, sans coupe à blanc [4] ni plantation, misant sur la régénération naturelle [5] d’espèces indigènes et l’abattage sélectif, tout en évitant la compaction des sols. La crise de la biodiversité et du climat l’impose.
Un modèle qui se démarque du système productiviste et non durable actuel qui aboutit à l’exportation des hêtres bruxellois vers la Chine, et retour vers l’Europe après transformation.
Plus la naturalité d’un écosystème, forestier ou autre, est élevée et plus sa résilience, sa robustesse face aux perturbations sont grandes. La naturalité d’une forêt est fonction de sa complexité structurelle et fonctionnelle.
Trois processus interdépendants sont nécessaires à l’amélioration de la résilience des écosystèmes et augmentent la biodiversité : la complexité trophique, la dispersion et la perturbation stochastique.
La complexité trophique d’une forêt est sa richesse en formes vivantes et les relations croisées et multiples que celles-ci entretiennent, gage d’un équilibre dynamique entre espèces.
La libre dispersion, deuxième élément clé du fonctionnement des écosystèmes, est la nécessité pour la faune de disposer d’espaces pour se nourrir, se reposer, se reproduire. Au fil de ses déplacements, elle génère une série de processus écologiques (création de sentes, transport de graines, déplacement de matière organique, etc.). La dispersion améliore également le flux des gènes, en assurant le croisement entre populations éloignées, ce qui les rend plus viables. Dans un contexte de dérèglements climatiques, la capacité de se déplacer deviendra également à l’avenir une condition de plus en plus essentielle à la survie de nombreuses espèces terrestres. La connectivité au sein de la forêt de Soignes et audelà vers d’autres espaces naturels est insuffisante. C’est un enjeu majeur pour restaurer une forêt résiliente, car la perte d’espèces diminue la robustesse d’un écosystème. Enfin, troisième élément clé de la résilience des écosystèmes, les perturbations naturelles qui se manifestent de manière stochastique (c’est-à-dire par l’effet du hasard) en termes de lieu, d’ampleur et de fréquence. En forêt, il s’agit principalement des tempêtes, des pullulations d’insectes ou d’autres organismes, des feux ou des inondations… qui redynamisent localement les cycles forestiers. La régénération naturelle s’active, la structure spatiale et le couvert végétal se diversifient, de nouvelles espèces se développent, la complexité trophique augmente à nouveau, atténuant à son tour les effets des perturbations. Bref, le système s’autorégule.
Ces trois processus écologiques s’influencent et se renforcent mutuellement, ils caractérisent une forêt en libre évolution, en voie de réensauvagement [6]. Les services écosystémiques rendus par une forêt sont fortement amplifiés par la libre évolution. La quantité de bois mort joue notamment un rôle déterminant dans le stockage du carbone, la rétention de l’eau (cycle de l’eau) et l’enrichissement du sol. Vu l’importance du massif forestier sonien, les bénéfices d’autres services écosystémiques comme la régulation des températures extrêmes, la production d’oxygène et la dépollution atmosphérique prennent une dimension régionale, ceux-ci étant proportionnels à son degré de naturalité.
Pendant des siècles, la nature et l’humanité ont été considérées par les Occidentaux comme deux mondes séparés. Ce dualisme exacerbé s’adoucit. Philosophes, historiens de l’environnement et écologues plaident pour une « reconnexion » de l’homme avec la nature. Pour autant, pratiquement aucun biome [7] terrestre n’est exempt d’influence humaine ; l’homme a partout et de tout temps modelé des paysages, façonné la nature et même modifié sa génétique. Directement ou indirectement, la végétation et la faune ont été modifiées par notre espèce. Il ne s’agit donc pas de prétendre à protéger ou à viser un espace totalement « naturel » au sens dualiste. Une forêt de Soignes en libre évolution ne signifie donc certainement pas « humains non admis ». Tout au contraire, une nature libre d’évoluer selon ses propres processus se doit d’être vue, admirée, et ouverte au public.
Se promener dans une forêt dite primaire (selon une terminologie à nuancer puisqu’il n’en existe probablement aucune au sens strict) est une expérience humaine étonnante. Le paysage forestier y est tout autre que ceux que nous connaissons, ponctué d’arbres géants, vigoureux et majestueux, d’autres sont affaiblis voire déjà morts debout, penchés, cassés, couchés au sol, couverts de mousse. Se régénérant patiemment à couvert, toutes les générations et les âges s’y côtoient, la structure verticale et spatiale est complexe, la biodiversité considérable, les puits de lumière distribués inégalement faisant varier la clarté et multipliant localement les niches écologiques. La beauté des grands arbres morts est saisissante. Ils offrent de la vie à une myriade de créatures qui foisonnent et servent de nourriture à d’autres. Le cycle redémarre ; la mort étant une condition sine qua non de la vie. Notre société occidentale repousse la mort, écarte les malades et les mourants. Elle agit de même avec les arbres, craignant que les mourants perdent de leur valeur, transmettent des maladies, ou qu’ils défigurent le spectacle d’un bataillon d’arbres sains et rentables n’ayant pas atteint sa maturité. La gestion sylvicole est conditionnée par la « normalité sanitaire » et la performance. Pressés d’intervenir pour « aider » la nature, nous sommes persuadés que nous connaissons mieux qu’elle ce qui lui sera bénéfique, ce qui la rendra plus résiliente face aux changements à venir.
Notre désir de maîtriser notre destin est sous pression face aux processus complexes et aléatoires du vivant.
Une forêt libre ne se développe pas selon nos attentes, elle nous surprend. Le désordre est complet – du moins selon notre définition de l’ordre –, un chaos apparent semble à l’œuvre alors qu’il n’en est rien. Notre désir de maîtriser notre destin est sous pression face aux processus complexes et aléatoires du vivant. Avoir la chance de vivre l’expérience du hasard en action est une école du lâcher-prise. La forêt de Soignes pourrait devenir en la matière la plus grande classe de la Région de Bruxelles-Capitale. Le paysage d’une forêt libre est changeant, dynamique, mouvant, imprévisible, il est une source d’inspiration et d’émerveillement. La nature en libre évolution nous apprend aussi le temps long. Nous n’évoluons pas à son rythme, c’est une école de la lenteur, de la patience et de l’observation respectueuse. Un arbre de plusieurs centaines d’années nous pousse à la réflexion, au respect et à la sagesse. Il n’en existe malheureusement presque plus dans nos forêts nettoyées et maîtrisées, devenues même par endroits de simples cultures d’arbres.
Le rôle éducatif de la forêt de Soignes peut aider au changement sociétal que nous espérons. La ville joue un rôle essentiel dans l’émergence et la propagation des nouveaux modes de pensée, d’agir et de vivre ensemble. Sans biodiversité urbaine, pas de sensibilisation à la biodiversité tout court, pas d’éducation à la sauvegarde de notre planète. Or l’humanité étant de plus en plus citadine, la biodiversité urbaine est un enjeu sociétal essentiel. Une forêt de Soignes en libre évolution serait une chance inouïe donnée aux Bruxellois·es de faire évoluer leur regard sur la nature et la planète, de développer une nouvelle forme de rapport respectueux au vivant, au sauvage.
Aucune action ne sera entreprise sur la hêtraie cathédrale qui sera laissée à ses propres processus, voire à son dépérissement progressif et son remplacement spontané par d’autres essences indigènes.
Le non-interventionnisme, le laisser-faire en matière de gestion n’implique pas que l’on ne fasse rien dans une forêt périurbaine. La libre évolution et les activités récréatives sont compatibles. Les sentiers pour promeneurs, joggers, vététistes, cavaliers ; les aires de pique-nique, de détente, des zones d’aventure hors sentiers, bien délimitées avec une signalétique adaptée ; des centres d’éducation à la nature ; des espaces pour l’école du dehors sont nécessaires. Les gardes forestiers joueront un rôle de surveillance, de suivi biologique, d’éducation et d’information. Les ouvriers forestiers élagueront ou abattront les arbres dangereux (et laisseront sur place la totalité du bois mort). Les lisières forestières en contact avec les habitations seront éclaircies, les routes sécurisées, créant ainsi une zone de transition antifeux de forêt, semi-ouverte, avec l’intérieur du massif. Aucune action ne sera entreprise sur la hêtraie cathédrale qui sera laissée à ses propres processus, voire à son dépérissement progressif et son remplacement spontané par d’autres essences indigènes. La déambulation hors des sentiers sera limitée à certaines zones pour les préserver de la pression potentielle de dizaines de milliers de promeneurs, non compatible avec la préservation de la biodiversité et des dynamiques naturelles. L’accès à certaines réserves naturelles à haute valeur biologique pourrait éventuellement être limité à des visites guidées. Les chiens devront rester sur les chemins d’une manière ou d’une autre, car ils sont nuisibles aux oiseaux nicheurs au sol et aux mammifères. Les zones de production de bois durable sont à concevoir dans une nouvelle optique, elles devront être limitées pour ne pas compromettre les autres bénéfices d’une forêt en libre évolution. Elles ne pourront en toute évidence contenter toute la demande bruxelloise en bois, et seuls des artisan·es ébénistes bruxellois·es devraient pouvoir en jouir.
Le « sauvage » revient en ville, les renards, les fouines, les faucons pèlerins, les autours des palombes en forêt, le hibou grand-duc, le grand corbeau, l’hirondelle de rivage, certaines orchidées font même leur retour en milieu urbanisé, de nouveaux arrivants s’annoncent comme la martre des pins, le blaireau ; ça bouge ! Les lérots, les putois, hermines, belettes, les chevreuils et les sangliers, les reptiles comme le lézard vivipare ou l’orvet commun, les amphibiens résistent, certains tentent de s’accrocher à la région bruxelloise, leur extinction locale n’est pas loin pour d’autres. Partager le territoire est un défi.
N’est-il pas temps de faire revenir aussi les processus écologiques naturels en forêt ? Une forêt périurbaine unique, en libre évolution, naturellement résiliente, une capitale en partie réensauvagée ?
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FORÊT & NATURALITÉ est une association qui défend les forêts naturelles et les espaces à haut degré de naturalité, en Belgique et ailleurs dans le monde. L’association promeut les concepts de naturalité, de libre évolution et de réensauvagement, ainsi qu’une gestion plus écologique des forêts, auprès des professionnels, des institutions et du grand public, via des dossiers, des conférences, etc.
https://www.foret-naturalite.be/
Forêt et Naturalité
[1] La notion de service écosystémique renvoie aux biens et services que fournissent les écosystèmes aux sociétés humaines et qui sont nécessaires à son fonctionnement et au bien-être de l’humanité. Ce concept issu d’une vision anthropocentrée de la nature est développé par des écologues dans les années 1970-1990. Il est popularisé par l’Évaluation des écosystèmes pour le millénaire (Millenium Ecosystem Assessment), une série de rapports rédigés à la demande des Nations Unies entre 2001 et 2005, qui avait pour objectif de déterminer les conséquences de l’évolution des écosystèmes sur l’humain et son bien-être. Les “SE” sont classés en quatre catégories : les services de support (processus écologiques nécessaires aux trois autres : cycle de l’eau, formation des sols, photosynthèse, etc.) ; les services d’approvisionnement (extraction de produits consommables ou utilisables : alimentation, eau, fibres, combustibles, etc.) ; les services de régulation (régulation des phénomènes naturels : du climat, de l’érosion, du cycle de l’eau, etc.) et les services culturels (non matériels : valeurs esthétiques, valeurs spirituelles et religieuses, valeur éducative, etc.).
[2] Chablis : un arbre (ou un groupe d’arbres) renversé et déraciné sous l’action d’agents naturels (vent, neige, foudre, tempête, ouragan, chute d’un autre arbre, mauvais enracinement ou pourriture des racines, etc.), sans intervention de l’homme.
[3] Naturalité : Le concept de naturalité renvoie à l’appréciation du caractère “naturel”, en opposition au caractère “artificiel”, d’un écosystème ; il s’exprime sous forme de gradient. Il dérive du concept de “wilderness”, qui recouvre néanmoins des spécificités et dont aucune transcription satisfaisante n’existe en français. Ces concepts ont fait l’objet de nombreux commentaires épistémologiques. Diverses méthodes d’évaluation de la naturalité ont été proposées, elles se basent sur des critères tels que des qualités écologiques élémentaires de l’écosystème (diversité spécifique, indigénat, complexité structurale, micro-habitats, maturité, dynamique et spontanéité, continuité spatiale et connectivité, ancienneté, etc.), voire des critères plus subjectifs et anthropiques (intensité du sentiment de nature, patrimonialité, etc.). L’intérêt de la notion réside à la fois dans le postulat écologique selon lequel plus l’écosystème est “naturel”, plus il est résilient, mais également dans le questionnement auquel il invite sur notre perception de la “nature” et notre relation à elle. Bien que d’usages relativement récents en Europe, les concepts de wilderness ou de naturalité sont de plus en plus utilisés dans différents textes d’orientation (stratégies nationales ou européennes), voire légaux, relatifs à la politique sur la biodiversité et les services écosystémiques.
[4] Coupe à blanc ou coupe rase : système de récolte - opération d’exploitation - qui consiste à abattre la totalité des arbres commercialisables d’une parcelle forestière et à ne laisser aucun couvert forestier. Cette gestion industrielle des forêts se pratique généralement pour la production de bois (plantation), parfois également pour des prétextes sanitaires.
[5] Régénération naturelle : désigne la capacité d’un écosystème à se reconstituer spontanément, sans intervention extérieure, après destruction de l’ensemble ou d’une partie du couvert forestier. Ce renouvellement de la forêt est l’un des stades du cycle sylvigénétique, soit le cycle d’évolution naturelle des forêts sauvages. Par métonymie, la régénération naturelle est le terme employé pour désigner l’ensemble des plantules et jeunes arbres dans une parcelle forestière.
[6] Réensauvagement : concept relativement nouveau dans le champ des sciences de la conservation et de la gestion de la nature. Connu également sous le terme de “rewilding” en anglais, il recouvre un ensemble de conceptions et de pratiques qui ont en commun de promouvoir la restauration des processus et dynamiques naturels des écosystèmes afin d’obtenir des écosystèmes fonctionnels, autonomes et spontanés, pour atteindre le potentiel maximum de résilience des écosystèmes. Il trouve aussi bien à s’appliquer dans des écosystèmes proches de l’état naturel ou, au contraire, très artificialisés, et peut se concrétiser dans une non-intervention totale (libre évolution) ou moyennant un coup de pouce initial via, par exemple, des travaux de restauration des dynamiques naturelles ou la (ré)introduction d’espèces fonctionnelles. La considération de l’espace et du temps y tient une place importante, tant en termes de surfaces suffisamment vastes comme support de territoires vitaux et de processus spontanés, qu’en termes de connectivité de ces espaces entre eux pour permettre le déplacement, la recolonisation et le brassage génétique des populations.
[7] Biome : unité écologique, également appelée aire biotique. Elle fait référence à une vaste zone géographique qui partage un climat, une faune et une flore similaires : un ensemble d’écosystèmes aux conditions écologiques identiques. Le climat détermine le type de sol, la flore et la faune, créant des écosystèmes à la biodiversité parfois très proche, sans être reliés géographiquement. Un même biome peut donc inclure des régions très éloignées. Les biomes mondiaux mettent en corrélation des forêts russes et canadiennes, alors que les biomes européens lient l’Irlande à la Roumanie. Le terme est dérivé du grec « bios » qui signifie « vie ». Il a été utilisé pour la première fois en 1916 par le botaniste américain Frederic Edward Clements, avant d’être défini par son compatriote Victor Ernest Shelford en 1931. Il fait depuis figure d’unité de référence pour la classification écologique des terres. L’étude des biomes appartient à la biogéographie, alors que l’ensemble des biomes n’est autre que la biosphère.