Milady Renoir, 2018.
Cher Promoteur,
Ce matin encore, la décélération de la colère ne nous parvient pas.
Chaque pas sur un pavé entre les immeubles qui se font et se défont,
bernant les arbres, les corneilles, les corps humains.
Chaque mât pénétrant l’espace public tire un trait sur la vision.
Et les conducteurs solitaires des voitures de plus en plus bouffies trompent
leur déréliction en éclats de gorges et de trompettes.
Encore plus fort, ces bruits répétés des tiges métalliques qui ne savourent
pas les glaises qu’elles engagent.
Aucun temps pris dans le désir de l’incursion des sols.
Qui mettra ses mains dans cette terre, maintes fois nommée gravats ?
Te rappelles-tu un jour, enfant, d’avoir enfoncé d’un doigt une semence dans un pot ?
Peaux grises et esprits ternes.
Loin d’un tableau du Douanier Rousseau.
Les hommes casqués, menottés à leurs machines, vrillent nos tempes, rouillent déjà.
Les contrats enflés de jargon pensant, les lobbys des lobbys des lobbys,
les strates spéculatives, les injonctions supranationales, les pertes de signes et de sens,
l’emportement de la pulsion, l’âpre furie de la conquête.
La guerre est animée de toute part.
Espaces Verts de Peur.
La ville titube déjà.
Les rues mutent en tunnels,
les trottoirs en couloirs,
les arbres en pivots,
les pigeons en vigies,
les corps humains en recrues.
Il y a quelque chose de pourri au Royaume de [...].
Milady Renoir, poétesse organique – militante fém’ intersectionnelle
https://miladyrenoir.org
Ce texte écrit presque dans la rue entre Arts et Loi, entre Lobbys et Instances EU, mon corps écrasé cherchant à ouvrir son thorax.