La directive européenne relative à l’évaluation des incidences sur l’environnement de certains plans et programmes a été sauvée !
À l’occasion d’un recours introduit par IEB, l’ARAU et Pétitions- Patrimoine contre la modification du COBAT (Code Bruxellois de l’Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme) de 2007, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a rendu un arrêt très progressiste. Il concerne le champ d’application de la directive européenne 2001/42/CE relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement. [1]
Cette directive prévoit que certains plans et programmes et leurs modifications, notamment dans le domaine de l’aménagement du territoire ou de l’utilisation des sols, doivent être soumis à évaluation des incidences sur l’environnement dès lors qu’il sont « exigés par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives ». A l’occasion de la modification du COBAT intervenue le 14 mai 2009 se posaient les questions suivantes : (i) une abrogation de plan particulier d’affectation du sol (PPAS) peut-elle être considérée comme une modification de plan ou programme au sens de la directive et (ii) le terme « exigé » utilisé dans la directive signifie-t-il que seuls les plans et programmes obligatoirement adoptés par les autorités (ce qui n’est en principe pas le cas du PPAS et du plan de gestion patrimoniale) sont soumis à évaluation des incidences. Autrement dit, la Région est-elle libre, comme elle le prétendait, d’adopter, de modifier ou d’abroger des PPAS et des plans de gestion patrimoniale sans évaluation préalable des incidences sur l’environnement ? [2]
La CJUE, interrogée par la Cour constitutionnelle, a rendu un arrêt visant à donner un effet utile à la directive. Elle a jugé que, dès lors qu’une abrogation de plan ou programme peut avoir des incidences notables sur l’environnement (puisqu’elle peut comporter des modifications de la planification sur le territoire concerné), cette abrogation doit faire l’objet d’une évaluation des incidences. Elle a aussi considéré qu’une interprétation qui conduirait à exclure du champ d’application de la directive tous les plans et programmes dont l’adoption dans les différents droits nationaux n’est pas obligatoire ne saurait être retenue dès lors que le but de la directive est de garantir un niveau élevé de protection de l’environnement. Dès lors, elle a considéré que le terme « exigé » employé par la directive concerne les plans et programmes « encadrés » par les autorités.
Suite à cet arrêt, la Cour constitutionnelle [3] a annulé les dispositions de l’ordonnance du 14 mai 2009 permettant au gouvernement d’abroger des PPAS sans évaluation préalable des incidences sur l’environnement. Elle a aussi considéré que dans le cas où un plan gestion patrimoniale peut être considéré comme un plan ou programme au sens de la directive (à voir au cas par cas), son adoption doit être précédée d’une évaluation des incidences.
Par ordonnance du 15 mars 2013 [4], le COBAT a été modifié en vue de se conformer à l’arrêt de la Cour constitutionnelle. L’abrogation d’un PPAS doit désormais faire l’objet d’une évaluation des incidences sur l’environnement, sauf si elle n’est pas susceptible d’influences notables sur l’environnement. Dans le cas où ils rentrent dans le champs d’application de la directive « plans et programmes », les plans de gestion patrimoniale (et leurs modifications) devront aussi faire l’objet d’un rapport sur les incidences environnementales.
Hélène Quoidbach
[1] CJUE, arrêt du 22 mars 2012, Inter-Environnement Bruxelles ASBL, Pétitions Patrimoine ASBL, Atelier de Recherche et d’Action Urbaine ASBL contre Région de Bruxelles Capitale , C-567/10.
[2] Le COBAT prévoit néanmoins que l’adoption et la modification des PPAS, sauf s’il n’y a pas de risque d’incidences notables sur l’environnement, font l’objet d’une procédure d’évaluation des incidences.
[3] Voir l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 19 juillet 2012, arrêt numéro 95/2012.
[4] Publiée au Moniteur Belge le 22 mars 2013.