Inter-Environnement Bruxelles
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1992 : L’histoire dé-cadrante de la planification territoriale bruxelloise

1992, c’est la date d’entrée en vigueur de la première législation bruxelloise en matière d’urbanisme : l’ordonnance organique de la planification et de l’urbanisme, en abrégé l’OPU. Jusqu’alors, la Région était régie par la loi du 29 mars 1962 organique de l’aménagement du territoire, adoptée dans le cadre de la structure unitaire de l’Etat belge. L’OPU sera remplacé en mai 2004 par le Code bruxellois de l’aménagement du territoire (CoBAT). Bref retour sur les fondations de notre cadre urbanistique et sur son évolution managériale masquant l’incapacité de notre gouvernement à respecter et faire respecter son propre cadre.

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La loi du 29 mars 1962 organique de l’aménagement du territoire, adoptée dans le cadre de la structure unitaire de l’Etat belge, marque la première tentative de régulation de l’aménagement du territoire, dans un contexte qui laissait une large part aux arrangements circonstanciels entre les acteurs de l’immobilier et les administrations publiques. C’est sous cette loi que le gouvernement fédéral a, en 1979, adopté le premier plan de secteur qui instaure notamment la procédure de publicité-concertation. Mais la logique dominante à l’œuvre restait l’instrumentalisation de l’agglomération bruxelloise comme facteur productif au profit de la nation.

Au terme de la troisième réforme institutionnelle, en 1989, Bruxelles est enfin reconnue comme une Région à part entière, aux côtés de la Région wallonne et de la Région flamande. Comme les deux autres Régions avant elle, elle reçoit de l’Etat fédéral les compétences en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire [1].

Rapidement, la nouvelle Région entame une profonde réforme de la législation relative à l’urbanisme et à l’aménagement du territoire, en adoptant l’ordonnance du 29 août 1991 organique de la planification et de l’urbanisme, en abrégé l’OPU, entrée en vigueur en juillet 1992. L’OPU se décline en 198 articles pour tenir compte des spécificités urbaines du territoire bruxellois : « l’exode urbain [2], la spéculation foncière aiguë qui sévit dans certains îlots, le développement des bureaux et des hôtels, l’encouragement à la construction et la rénovation de logements ainsi que leurs possibilités d’accès, les difficultés accrues de circulation » [3]. D’autres ordonnances et arrêtés viendront compléter le dispositif, relativement à l’accès à l’information, aux commissions de concertation, à l’évaluation préalable des incidences sur l’environnement, etc.

Aux termes de l’article 2 de l’OPU, « le développement de la Région de Bruxelles-Capitale, en ce compris l’aménagement de son territoire (...) est conçu tant au point de vue économique, social et esthétique que dans le but de préserver et d’améliorer l’environnement de la Région et de gérer son sol avec parcimonie ». L’ordonnance traduit ainsi la volonté du législateur de décloisonner les matières de la planification spatiale et de la planification économique. En d’autres termes, l’aménagement du territoire est intégré dans un objectif plus vaste de planification économique [4].

Quatre types de plans sont mis en place, selon la hiérarchie suivante :

  • le plan régional de développement (PRD), qui remplace l’ancien plan régional : il s’agit d’un plan stratégique qui définit les grandes orientations politiques pour le développement de la Région, et ce, tant dans les matières strictement régionales que dans les matières culturelles ou sociales. Initialement conçu pour concrétiser les axes de la déclaration gouvernementale, il devait être revu à l’issue de la législature régionale, tous les cinq ans [5]. Le premier PRD, adopté le 25 mars 1995, avait pour vocation de limiter le développement des bureaux au détriment d’autres fonctions, jugées faibles, comme le logement et l’industrie. Alors que toutes ses dispositions ont aujourd’hui valeur indicative, une partie du premier PRD avait valeur réglementaire et remplaçait partiellement le plan de secteur de 1979 ;
  • le plan régional d’affectation du sol (PRAS), qui succède au plan de secteur et détermine, dans le cadre fixé par le PRD, les différentes affectations du territoire qui doivent être respectées par les demandeurs de permis. Le premier PRAS est entré en vigueur en 2001 ;
  • les plans communaux de développement (PCD), qui remplacent les anciens plans généraux d’aménagement et fixent les grandes orientations stratégiques à l’échelon communal ;
  • les plans particuliers d’affectation du sol (PPAS), qui remplacent les anciens plans particuliers d’aménagement et précisent, dans le cadre fixé par le PCD qui lui correspond, les affectations du territoire applicables à une partie du territoire communal.

L’échéance temporelle visée par les outils réglementaires tels que le PRAS et les PPAS est en général plus longue que celle des outils stratégiques : minimum 15 ans pour un PRAS ; beaucoup de PPAS qui datent des années 60-70 n’ont pas été révisés. Ils sont peu à peu abrogés.

L’ordonnance de 1991 a le mérite de conforter certains acquis du passé, notamment le mécanisme de la publicité-concertation, largement porté par l’ARAU et IEB et qui, comme tel, n’existe encore aujourd’hui qu’en Région de Bruxelles-Capitale [6]. Dès le début, il figure au titre des dispositions générales de l’ordonnance, témoin de son importance. C’est aussi dans le cadre de l’OPU que disparaît la dénomination « permis de bâtir » au profit de la dénomination actuelle « permis d’urbanisme » [7].

La nouvelle ordonnance est bien accueillie par le secteur associatif. IEB titrera un article de sa revue Ville et Habitant : « Nouvelle ordonnance : une avancée démocratique à saisir » [8].

L’OPU a été modifiée à seize reprises entre 1991 et 2004 [9]. Avec l’ordonnance du 9 avril 2004, elle devient le Code bruxellois de l’aménagement du territoire, dit CoBAT. Le CoBAT a lui-même fait l’objet d’une trentaine de révisions à ce jour. Les différentes modifications de la législation de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme ont principalement eu pour objectif, d’une part, la simplification et la rationalisation des procédures et, d’autre part, l’intégration de nouvelles préoccupations, notamment liées aux exigences de l’Union européenne (évaluation des incidences, protection des sites Natura 2000, etc.) [10].

Sur papier, le CoBAT, comme l’OPU avant lui, nous offre une hiérarchie claire des plans. Le PRD et le PRAS fournissent respectivement les fondations stratégiques et réglementaires des autres plans et des permis, notamment d’urbanisme, délivrés en Région bruxelloise. Cette belle architecture va cependant être profondément mise à mal par la suite. D’abord, parce que le Gouvernement ne tiendra pas le rythme de l’adoption d’un nouveau PRD au début de chaque nouvelle législature. Le deuxième PRD a été adopté en 2002, soit sept ans après le premier. Ensuite, parce que d’autres plans stratégiques ont vu le jour, comme le plan de développement international (PDI) en 2007 ou le Plan canal en 2013, et ce, en dehors de tout fondement légal. Ces plans, sans assise organique, auront pourtant des conséquences territoriales et foncières bien plus puissantes que le système de planification démocratiquement institué par le CoBAT.

La fuite hors cadre

En 2011, le gouvernement se décide enfin à lancer le processus d’adoption d’un nouveau PRD, dit durable. En 2012 cependant, et alors que le PRD « durable » ne sera adopté qu’en 2018, il choisit d’adopter dans l’urgence un PRAS « démographique », ouvrant ainsi grand la porte à plus de bureaux, plus de logements privés inaccessibles aux Bruxellois.es, plus d’infrastructures de prestige (un nouveau stade de foot, un centre de congrès) mais aussi à un méga centre commercial (le projet NEO), le tout dans le but de donner un cadre au PDI et de répondre au boom démographique auquel la Région doit faire face [11].

Cette inversion planologique consistant à adopter de nouvelles affectations du sol avant même que les grandes orientations politiques soient débattues et avalisées fut fortement critiquée par le secteur associatif dont IEB. Une bonne gouvernance exige en effet que le projet de ville soit défini avant sa mise en carte réglementaire, que l’intérêt général soit défini avant sa traduction technocratique. Ne faut-il pas connaître les priorités liées aux différentes fonctions urbaines et aux besoins humains et sociaux qui les sous-tendent (besoins en logement, équipements publics, activités économiques, infrastructures de mobilité) pour savoir combien, où et comment les implanter ? [12]

Les choses s’accélèrent avec l’arrivée du nouveau gouvernement bruxellois. Dès son intronisation en 2014, le gouvernement annonce son intention de chambouler profondément le paysage urbanistique. L’accord de majorité 2014-2019 consacre deux chapitres à ce sujet, sous des titres peu équivoques : « Une politique urbanistique régionale simplifiée et de qualité » et « Révolutionner la gouvernance ». L’intention du gouvernement est exprimée encore plus clairement par Rudi Vervoort dans le Soir du 26 mars 2016 : il s’agit de répondre « aux attentes du secteur immobilier qui éprouve de grandes difficultés à développer des projets importants vu la longueur et la complexité des procédures urbanistiques et environnementales ».

En l’espace de cinq ans, c’est l’ensemble des repères urbanistiques des Bruxellois.es qui vont être profondément bouleversés. La réglementation va être remaniée de fond en comble au nom de l’efficacité, de la simplification et du besoin de répondre au boom annoncé de la démographie bruxelloise, brandie comme une menace justifiant toutes les urgences.

Outre une importante révision du CoBAT, de multiples réformes vont se poursuivre après les élections de 2014, et ce, alors que le cadre du projet de ville – le PRD – reste en panne : refonte de la politique de la rénovation urbaine au travers de la création des contrats de rénovation urbaine (CRU), refonte de la gouvernance urbaine à travers la structuration de nouveaux Organismes d’intérêt public (OIP). [13] Ces réformes vont vider peu à peu de son sens l’adoption d’un PRDD dont l’essentiel de la substance se trouvera déjà tranché par le gouvernement bruxellois à travers ses autres réformes avec peu ou pas de débat public.

Non seulement les logiques de la hiérarchie planologique régionale sont ainsi affaiblies mais aussi la capacité de la Région à articuler entre elles l’ensemble des problématiques territoriales. Souplesse et efficacité sont devenus les maîtres mots qui justifient la mise au banc du Parlement, réduit à décider d’un cadre souple auquel le Gouvernement peut systématiquement déroger.

La réforme managériale de 2018

La réforme du CoBAT sera votée le 13 octobre 2017 à une courte majorité (44 oui, 32 non et 3 abstentions). Il est indéniable que les modifications apportées au CoBAT répondent aux objectifs annoncés : simplifier les procédures urbanistiques et accélérer le travail des administrations afin de faciliter les projets de développement urbain. C’est ainsi que la réforme comprime de nombreux délais de procédure tout en les transformant en délais de rigueur, diminue la protection du patrimoine, assouplit le contenu obligatoire des PPAS, réduit substantiellement la notion de lotissement, etc. De nombreux observateurs voient dans la réforme un affaiblissement de la norme, une diminution des garanties de protection accordées à l’environnement et, par voie de conséquence, une diminution des garanties de protection accordées aux citoyens. [14]

Trois points de la réforme ont tout particulièrement retenu notre attention.

A contre-courant de notre demande, le nouveau CoBAT cantonne pour l’essentiel la participation citoyenne à l’enquête publique. La Commission régionale de développement (CRD) [15] n’est plus composée que d’« experts indépendants » au lieu de la représentation transversale des différentes commissions de la Région (Conseil de l’environnement, Conseil consultatif du logement, CRMS, etc.) qui prévalait jusque-là et qui permettait une représentation de la société civile au sein de la CRD. La réforme supprime par ailleurs l’enquête publique sur le cahier des charges de l’étude d’incidences sur l’environnement, laquelle permettait dès l’amont de définir ce qui doit être utilement étudié par le bureau d’étude pour assurer la qualité du projet.

Ensuite, la réforme du CoBAT constitue une occasion manquée de soumettre les deux procédures de l’étude d’incidences et du rapport d’incidences aux mêmes garanties procédurales : contrairement à ce qui est prévu pour les projets soumis à études d’incidences sur l’environnement (EIE), l’auteur du rapport sur les incidences environnementales (RIE) ne doit pas être un bureau d’étude agréé et son travail n’est pas supervisé par un comité d’accompagnement. Pis, la réforme affaiblit le système d’évaluation des incidences sur l’environnement qui existait jusqu’alors. Outre la suppression de l’enquête publique sur le cahier des charges, le législateur décide, en pleine crise climatique, de doubler le seuil à partir duquel un projet de parking doit être soumis à étude d’incidences sur l’environnement (EIE), passant de 200 à 400 emplacements ! C’est la vigilance d’un citoyen, soutenu par IEB, qui permettra d’obtenir l’annulation par la Cour constitutionnelle de cette disposition environnementalement suicidaire.

Enfin, et peut-être même surtout, le CoBAT crée un nouveau plan venant profondément perturber l’architecture hiérarchique et démocratique : le plan d’aménagement directeur (PAD). Le PAD peut être qualifié d’outil de planification sur mesure de projets immobiliers dérogatoires . En effet, son volet réglementaire, lorsqu’il en contient un, abroge l’ensemble des dispositions réglementaires qui lui sont contraires et permet ainsi de « libérer » les projets dérogatoires destinés à s’implanter dans son périmètre « de la plupart des contraintes réglementaires » qui leur seraient normalement applicables, en faisant « l’économie des procédures de révision propres [aux outils concernés] » [16]. Si les PAD font bien l’objet d’une enquête publique, ils ne sont pas soumis à l’avis de la commission de concertation. L’habitant, le comité de quartier, l’association, se retrouve seul avec ses propres constats, questions et analyses, privé d’un moment singulier où l’avis des autres tiers au projet pouvait nourrir sa réflexion sur le projet.

Pour couronner le tout, les projets de PAD font l’objet d’une campagne marathon orchestrée par Perspective.brussels en 2018 : en vingt réunions étalées sur six jours ouvrables, l’instance a organisé des débats relatifs à dix PAD concernant les territoires prioritaires de la Région. Dynamique de choc que de nombreuses associations et citoyens n’ont pas manqué d’épingler comme un déni démocratique [17] : comment imaginer que l’habitant, et même l’association, puisse, sur une période de temps restreinte, digérer une telle masse d’informations et y réagir de manière utile ? C’est ainsi que naîtra en février 2020 la plate-forme Bas les PAD demandant de toute urgence un moratoire sur les PAD en vue de stopper le double processus de dérégulation du cadre réglementaire et d’affaiblissement du débat public [18].

Tant et si bien que le feu d’artifice des PAD n’aura pas lieu. Six ans plus tard, plusieurs d’entre eux ont connu de profonds réaménagements et deux d’entre eux – le PAD Loi et le PAD Midi – ont été mis au frigo pour être remplacés par des processus de « visions partagées ».

Le nouveau CoBAT met également sur pied, dans le cadre de la procédure de délivrance des permis, des réunions de projet, sorte de pré-concertation entre les autorités administratives et les porteurs de projets, à huis clos et sans aucune publicité. Ces négociations derrière portes closes rendent souvent caduc le processus de concertation, les riverains se voyant régulièrement opposer que le projet qui leur est soumis est le fruit d’un subtil équilibre longuement négocié auquel il serait risqué de toucher. De surcroît, les procès-verbaux des réunions de projet, lorsqu’ils existent [19] ne sont pas librement accessibles, renforçant le sentiment de mystification des habitant.es. Dans ce contexte, IEB a, en mai 2022, officiellement sollicité de l’administration de l’urbanisme (Urban.brussels) qu’elle lui communique la copie des procès-verbaux des réunions de projet du premier trimestre 2022. Face au silence persistant de l’administration, IEB s’est résolue à saisir la Commission d’accès aux documents administratifs de la Région bruxelloise (CADA), laquelle a donné raison à IEB et enjoint à Urban de lui communiquer les documents demandés. Il conviendrait a minima que les procès-verbaux des réunions de projet, d’une part, soient obligatoires et, d’autre part, soient joints aux dossiers de demande de permis [20].

Quant aux fameux délais de rigueur imposés aux communes dans le traitement des permis d’urbanisme en vue d’accélérer le processus de délivrance, ils mettront à mal l’organisation de bon nombre de communes et conduiront à des pratiques de contournement peu productives, comme le fait de systématiquement déclarer le dossier incomplet pour éviter de faire courir les délais ou une augmentation des saisines automatiques par la Région de la part des communes avec un risque d’engorgement au niveau régional. Pascal Smet, alors encore secrétaire d’Etat à l’urbanisme, reconnait que le système actuel ne fonctionne pas et propose comme solutions d’allonger les délais de rigueur d’un mois, d’accélérer la digitalisation de la procédure de demande de permis et de mieux distinguer les demandes qui relèvent de la compétence régionale et celles qui relèvent de la compétence communale, en supprimant ou en tout cas en réduisant à l’essentiel les possibilités de saisine automatique du fonctionnaire délégué [21].

Vers une énième réforme avortée

Sans doute conscient des divers travers de la réforme, le nouveau gouvernement en place pour la législature 2019-2024 annoncera dans sa déclaration de politique générale « une évaluation de la mise en œuvre de la réforme du CoBAT sera réalisée après un an d’entrée en vigueur du texte. Le cas échéant, le Gouvernement proposera des adaptations réglementaires visant à simplifier les procédures ». Le processus mettra un peu de temps à se mettre en place. Le bureau d’étude City Tools a été désigné en 2022 pour organiser des ateliers en vue de procéder à l’évaluation, qui sera scindée en deux phases :

1. la première se focalise sur la procédure des permis : deux séries d’ateliers se sont tenus fin 2022 en présence des administrations régionales et communales, des représentants des cabinets compétents en matière d’urbanisme ainsi que de divers acteurs de la société civile (architectes, urbanistes, promoteurs, IEB, le Bral,… ). Suite à ces ateliers, City Tools a sorti un rapport rendu public et qui propose des mesures visant à répondre aux diverses critiques émanant des participants. [22] Le rapport insiste sur la nécessité d’instaurer un meilleur suivi, de donner des formations approfondies continues pour les agents de l’administration en charge de ces matières et de réserver un temps suffisant à une analyse de fond qualitative des demandes de permis, tout en synchronisant les délais entre les permis d’urbanisme et les permis d’environnement. Il propose également la mise en place d’un « urban ruling » et de « project lines » pour limiter la spéculation sur les grands projets, lesquels viendraient remplacer le certificat d’urbanisme23, et de clarifier le rôle des réunions de projet et la publicité de leurs procès-verbaux. L’enquête publique se résumerait à une procédure écrite avec possibilité de demander une audition citoyenne mais la possibilité d’organiser dès l’amont du projet une réunion de dialogue préalable serait développée avec une réunion d’information obligatoire au lancement de l’enquête publique pour les gros projets. On le voit, il y a à boire et à manger dans ces propositions dont certaines exigeront toute la vigilance de l’ARAU, du BRAL et d’IEB pour s’assurer que la démocratie urbaine ne soit pas mise à mal au nom des principes d’efficience.

2. a seconde phase portait sur la planification urbaine, les règlements d’urbanisme et la protection du patrimoine. Le même déroulé en ateliers fut utilisé en mars 2023 mais à l’issue de ceux-ci aucun rapport ne fut communiqué. Au final, la législature se clôture avec un demi-rapport d’évaluation public et un rapport resté dans les limbes de l’administration.

Le miroir aux alouettes de la simplification

A force de vouloir simplifier, on a surtout l’impression d’assister à des réformes qui se succèdent sans jamais parvenir à rendre lisible ni pleinement démocratique la machine urbanistique. Aujourd’hui, tant les administrations que les associations et habitant.es peinent à y voir clair face à l’inflation des instruments d’aménagement du territoire et à un cadre urbanistique qui se construit tout en s’autodétruisant. Nous demandons au gouvernement de reprendre le fil de la démocratie urbaine en remettant à l’avant-plan la dimension politique du projet urbain, sans passer son temps à colmater des brèches par crainte des critiques citoyennes et à détricoter un cadre dans l’espoir illusoire qu’il plaise tant aux promoteurs qu’aux habitant.es.


[1Article 4 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.

[280.000 habitants ont quitté Bruxelles pour le Brabant dans les années 70 et 40.000 dans les années 80 (Bruxelles Urbanisme et patrimoine, Urbanisme aux 19e et 20e siècles. Bruxelles – Histoire de planifier, Bruxelles, Mardaga, 2017, p. 427).

[3F. Maussion, « Introduction générale », L’urbanisme à Bruxelles (F. Haumont, F. Maussion et M. Uyttendaele), Editions du jeune barreau de Bruxelles, Bruxelles, 1992, p. II.

[4J.-F. Neuray, « Les innovations en matière d’urbanisme à Bruxelles. Réflexions sur l’ordonnance du 29 août 1991 organique de la planification et de l’urbanisme », L’urbanisme à Bruxelles (F. Haumont, F. Maussion et M. Uyttendaele), Editions du jeune barreau de Bruxelles, Bruxelles, 1992, pp. 16-17.

[5L’exigence selon laquelle le PRD doit être revu lors de chaque nouvelle installation du parlement régional a ensuite été jugée excessive et supprimée par l’ordonnance du 19 février 2004. Actuellement, l’article 1, alinéa 2, du CoBAT prévoit que : « Dans les six mois qui suivent celui de l’installation du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, le Gouvernement transmet, pour information au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, un rapport sur son intention de procéder à une éventuelle modification totale ou partielle du plan régional de développement ».

[6Sur la naissance de la publicité-concertation, v. « 1976 : Naissance de la publicité-concertation à Bruxelles »

[7« La Région prend les arrêtés d’application de son ordonnance d’urbanisme. Pour ne pas bâtir n’importe comment », Le Soir, 4 septembre 1992.

[8Ville et Habitant, n° 219, octobre 1992, p. 16.

[9Bruxelles Urbanisme et patrimoine, Urbanisme aux 19e et 20e siècles. Bruxelles – Histoire de planifier, Bruxelles, Mardaga, 2017, p. 426

[10Bruxelles Urbanisme et patrimoine, Urbanisme aux 19e et 20e siècles. Bruxelles – Histoire de planifier, Bruxelles, Mardaga, 2017, p. 427.

[11Nous reviendrons là-dessus dans une prochaine chronique.

[12Lire notre dossier : PRAS démographique, clash démocratique.

[14Avis commun rendu par IEB, le BRAL et l’ARAU sur le projet d’ordonnance modifiant le CoBAT, 6 mars 2017 : ieb.be

[15La CRD est une commission qui rend des avis au Gouvernement régional sur les avant-projets d’ordonnance, les projets d’arrêtés, les projets de plans et règlements régionaux et communaux, dans les matières de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, dans la mesure où ceux-ci ont une incidence notable sur le développement de la Région.

[16J. Van Ypersele, P. Levert et Y. Feng, « La réforme du 30 novembre 2017 du Code bruxellois de l’aménagement du territoire : quelques bouleversements en perspective », Amén., 2018/2, p. 104.

[17Voir « Faire la ville sans les gens ? Pour une refonte des politiques de participation à Bruxelles », carte blanche parue dans Le Soir, 25/06/2018.

[19L’arrêté ministériel balisant la réunion utilise en effet une formulation des plus floues : « Si un procès-verbal de la réunion de projet est rédigé… ».

[20Cette mesure pourrait être intégrée dans la réforme du CoBAT à venir (Citytools, « Evaluation du CoBAT, Séquence 1 : Comment améliorer la procédure de permis », décembre 2022, p. 60).